La grôla

        O y ay'ina grôla que venyë se posí tou lo madin su la groussa fréna, l'atindë que la polayi sôrte diyôre pa lué prindre se piyós. O nin manquôve dijà quatro. Si je ne volyin pô que tota la nichá y pôsse, o n'y ayë qu'ina chousa à fére: prindre lo fusil è touô cela sôla grôla. J'ayin songí qu'in me cachant darrire la payiri, je porin la tirí, mè le grôle, o vè kyar, quand je levôve mon fusil pa l'ajustô, le s'involôve d'in bô, pô question de tirí à travar le branche, l'arë importô mon coup. Mon vusin, lo Marius, me disé: pa pochè touô cela grôla, o fô se betô deux: te, te ferô los cent pôs pa lo chemin, le man din le saque, in avisant bien la grôla, la grôla t'aviserá ètë, pindant çu tin, je passerai darrire la payiri è la grôla ne me varrá pô, le será fran trop occupô à t'avisô è je porrai la tirí. Lo lindeman madin, la grôla éty revenouá su la fréna, j'appelo lo Marius è je fan comme j'ayan decidô la véyi. Ou bo d'in momint, o pete. La grôla m'avisôve toujor, j'intindé lo Marius que disyë marda, la cartouchi ne valë rin, resta tyí, je voué corre lo douze. A corré vito vé chi yello et revené avoué son ôtro fusil. Ceta vè, la cartouchi étye bona, è comme o y ayë petô, je vayé degringolô la grôla, l'ayë étô touô net, l'ayë 'na groussa téta, le devë étre viyi, è je pinso qu'in devenant viyi, l'étye devenouá sôrda, o yé pa tyin que le n'ayë pô intindu petô lo parmí coup de fusil.

Docteur Perrin

        Lo docteur Perrin aye étô appelô in visita chi Machizaud de la Pocachardiri. Lo pôre éte bien, bien malado, al étye din son yë, la téta covarta pa lo drap. Lo docteur s'approchí, solevé lo drap, se reviri vé la môre et y disé : Mais il est mort ! Lo pouro vieux se reviye et dé : Non, je ne sué pô môrt ! Sa fenna se retornë et lué cria : Quési-te don, bougro de tavelô, lo medecin sa ben ce qu'a dé !

 
Jean Voutes, de Thurins (Rhône). Textes recueillis en 1999. Francoprovençal, dialecte du Pays Lyonnais

 

Traductions :

La corneille

        Il y avait une corneille qui venait se poser tous les matins sur le gros frêne, elle atenadait que la poule sorte dehors pour lui prendre ses poussins. Il en manquait déjà quatre. Si je ne voulais pas que toute la nichée y passe, il n'y avait qu'une chose à faire : prendre le fusil et tuer cette sale corneille.  J'avais songé qu'n me cachant derrière la meule de paille, je pourrais la tirer, mais les corneilles, ça voit clair, quand je levais mon fusil pour l'ajuster, elle s'envolait d'en bas, pas question de la tirer à travers les branches, elle aurait emporté mon coup. Mon voisin, le Marius me dit : pour pouvoir tuer cette corneille, il faut s'y mettre à deux. Toi, tu feras les cent pas sur le chemin, les mains dans les poches, en regardant bien la corneille, la corneille te regardera aussi, pendant ce temps,  je passerai derrière la meule et la corneille ne me verra pas, elle sera bien trop occupée à te regarder et je pourrai la tirer. darrire la payiri è la grôla ne me varrá pô, le será fran trop occupô à t'avisô è je porin la tirí. Le lendemain matin, la corneille était revenue sur le frêne, j'appelle le Marius et nous faisons comme nous avions décidé la veille. Au bout d'un moment, ça pète. La corneille me regardait toujours, j'entendis le Marius qui disait m..., la cartouche ne valait rien, reste là, je vais chercher le douze. A courut vite chez lui et revint avec son autre fusil. Cette fois, la cartouche était bonne, et comme cela avait peté, je vis degringoler la corneille, elle avait été tuée net, elle avait une grosse tête, elle devait être vieille, et je pense qu'en devenant vieille, elle était devenue sourde, c'est pour cela qu'elle n'avait pas entendu péter le premier coup de fusil.

Docteur Perrin

        Le docteur Perrin avait été appelé en visite chez  Machizaud de la Pocachardière. Le père était bien, bien malade, il était dans son lit, la tête couverte du drap. Le docteur s'approcha, souleva le drap, se retourna du côté de la mère et lui dit : Mais il est mort ! Le pauvre vieux se réveille et dit : Non, je ne suis pas môrt ! Sa femme se retourna et lui cria : Tais-toi donc, bougre d'imbécile, le médecin sait bien ce qu'il dit !

 

 


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