LA CRECHE DE VAUGNERAY


Mystère en trois actes et en patois des Monts du Lyonnais


© Transcription et glossaire Claude Longre

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Personnages

Le Divin Enfant
Dame Marie
Sire Joseph
L’Archange Gabriel
Saint Jean Baptiste
Marie-Madeleine
L’Ane
Le Bœuf
Benoît Gouttebidaud, vigneron de Vaugneray
Sambé, confident de Gouttebidaud
Le Frère Blaise, solitaire de la Déserte
Le Frère Damase, moine quêteur de Grézieu
Sœur Pauline, de l’Hôtel-Dieu de Lyon
L’avocat Bertrand, de Lyon
Mère Jeannette
Le magnin
Le blanchisseur
Milon
La dame de Lyon
Le bailli
Saint Bonnet
Messire Radix, curé de Vaugneray
Sœur St-Joseph, de Vaugneray
Les Rois Mages
Anges et Bergers
Le Diable

Prologue


Jean-Baptiste

Jean-Baptiste, le précurseur, vous annonce la naissance du Christ… Préparez la voie du Seigneur…

Les anges, parlé

Le Christ est né… Préparez la voie du Seigneur…

Marie-Madeleine

Le Christ est né pour sauver les pécheurs : réjouissez-vous…

L’archange

Silence… Silence… braves gens de Vaugneray et d’ailleurs qui m’écoutez…
Le Très-Haut m’a chargé de la plus grande mission… J’ai annoncé il y a plusieurs mois à Notre Dame qu’elle serait Mère de Dieu… Aujourd’hui, je viens vous informer que le Divin Enfant qu’elle devait mettre au monde est né ; c’est Celui que les hommes attendaient depuis plus de quatre mille ans… Celui qui doit effacer en vous la tache originelle…
Déjà les cloches ont fait entendre leurs voix pour fêter ce grand mystère, et mes frères les anges ont franchi par légions les portes du Ciel, pour porter la paix du Seigneur aux hommes de bonne volonté.
Votre Sauveur n’est point né dans un palais comme le fils d’un roi, mais dans une pauvre étable, pour vous faire comprendre à tous ce qu’est la sainte pauvreté… Notre Dame et Joseph son époux adorent en silence le petit Nouveau-Né qui repose sur la paille fraîche, pendant qu’un âne et un bœuf réchauffent de leur haleine ses membres engourdis par le froid…

Les anges, parlé

Le Christ est né ; réjouissez-vous, réjouissez-vous…

L’âne

Hi han… hi han…hi han… Je vous adore, Petit Enfant, et vous reconnais comme mon Maître… Je vous remercie de m’avoir choisi parmi tous mes semblables et de m’avoir permis de contempler ce que beaucoup d’humains auraient désiré voir ; vous avez voulu récompenser ceux de ma race et moi-même parce que nous devons souffrir sans nous plaindre… j’aurais bien voulu donner un coup de mon sabot à ce vilain aubergiste de Craponne qui nous a refusé l’hospitalité, mais je me suis souvenu que vous étiez là…
Hi han… hi han…hi han… Je suis bien fatigué : j’ai fait une longue course, en prenant sur mon dos Dame Marie, votre mère, pendant que Sire Joseph marchait à mes côtés. Je vais m’éloigner un peu dans les prairies voisines, pour brouter pendant quelques heures l’herbe nécessaire à ma subsistance…

Le bœuf

Meuh… meuh… meuh… Puisque le Seigneur nous a permis à nous bêtes de parler pendant cette sainte nuit, j’en profite pour vous dire que je vous adore, cher Petit Enfant, et que je vous reconnais comme mon Créateur. J’ai fait de mon mieux pour vous réchauffer ; pardonnez-moi si je n’y suis pas arrivé…
Meuh… meuh… meuh… J’étais occupé à paître dans un des prés de la Maison Blanche, quand une force mystérieuse m’a poussé jusqu’ici. Maintenant que ma tâche est remplie, je vais rejoindre mes compagnons et leur faire part de ma joie ; tout en ruminant l’herbe tendre, je réfléchirai pendant longtemps encore à l’événement qu’il m’a été donné de contempler cette nuit…

Les anges, parlé

Le Christ est né ; réjouissez-vous… réjouissez-vous…

L’archange

Toutes les créatures tressaillent d’allégresse à la venue du Sauveur…
Bientôt, les bergers des environs viendront offrir au Divin Enfant leurs hommages et leurs présents ; le Seigneur a voulu qu’ils fussent les premiers à le contempler, eux les petits et les humbles…
Puis arriveront les adorateurs de Vaugneray et du voisinage ; ils se présenteront naïvement devant le Divin Enfant, tels qu’ils sont, avec leurs qualités qu’ils connaissent bien…et aussi avec leurs défauts qu’ils ne soupçonnent pas ; ils vous feront sourire plus d’une fois, soyez indulgents, comme votre Sauveur qui vient de naître le sera pour eux… Tirez profit de ce qu’il vous sera donné d’entendre et de voir… Faites un retour sur vous-même… peut-être trouverez-vous en vous les mêmes manquements que vous trouverez en eux… Demandez pardon du fond du cœur à votre Sauveur, et il vous pardonnera en ce grand jour… Quelques chrétiens passeront ici, ignorant tout du grand Mystère ; priez le Seigneur afin qu’Il leur ouvre bientôt les yeux…
Enfin viendront de l’Orient, conduits par une étoile merveilleuse, les Rois Mages ; ils offriront au Divin Enfant l’or, l’encens et la myrrhe ; joignez-vous à eux, pour offrir à votre Sauveur l’or brillant de vos cœurs, le parfum de vos prières et la myrrhe de votre pénitence…
Réjouissez-vous tous… que vos cœurs soient dans la joie en cette sainte nuit… Unissez vos voix à celles des chœurs angéliques, pour chanter Noël… Noël…

Les bergers, parlé

Le Sauveur est né pour effacer nos péchés ; réjouissons-nous… réjouissons-nous… réjouissons-nous… Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur…

Premier Acte

Scène I

Les Anges et les Bergers (Chanté)

Les Anges

Gloria, gloria in excelsis Deo (bis)

Les Bergers

Que de cris d’allégresse,
Quels chants mélodieux
Dans les cieux.
On répète sans cesse
Que gloire soit à Dieu,
La paix dans ces bas lieux.

Un Berger

O vous que j’aperçois,
Répondez-moi,
Sans contrainte
Et sans feinte ;
Qu’annoncez-vous aujourd’hui
Environ l’heure de minuit ?

Un Ange

J’annonce un mystère
Sur la terre
Qui va faire
Le bonheur de l’univers.
Un Dieu vient pour briser vos fers.
Soyez dans la joie ;
Le ciel m’envoie
Pour vous dire
Qu’il désire
Que vous partiez promptement
Pour aller adorer l’Enfant.

Le Berger

Messager fidèle,
La nouvelle
Est si belle
Qu’elle me ravit le cœur.
Dites-moi où est le Sauveur,
Quel est son séjour ;
Quelle est sa cour ;
Sa demeure.
Tout à l’heure,
Je m’en vais quitter ces lieux
Pour aller lui offrir mes vœux.

L’Ange

Un lieu méprisable,
Une étable
Misérable
Est ce que l’Enfant choisit,
Lieu que le prophète a prédit,
Couché dans le foin,
Dans le besoin,
Il endure
La froidure,
Dans le plus fort de l’hiver,
Et plusieurs autres maux divers.

Le Berger à ses compagnons

Cette voix charmante
Qui m’enchante,
Me contente,
Non, jamais rien de si beau
Que ce chant joyeux et nouveau,
Quittons donc ces bois,
Et que nos voix
Retentissent
Et s’unissent
Aux concerts mélodieux
Qu’on fait cette nuit dans les cieux.

Les Bergers

Bel ange, sans les pastoureaux
Que feront nos troupeaux ?
Ah, ils s’égareront dedans ces bois là-haut.
Le loup viendra, sanglant
Et ravissant,
Avecque sa grand’griffe
Griffe, griffe, griffe,
Avecque sa grand’griffe
Il prendra les plus beaux.

Les Anges

Allez, bergers, ne craignez point.
Celui qui est sur le foin,
Encor qu’Il soit petit ; il en aura soin
S’Il est enfant,
Il est Dieu tout-puissant ;
Il gardera vos troupes
Toutes, toutes, toutes,
Et n’ayez aucuns doutes,
Du loup ravissant.

Les Bergers, se retirant lentement

Chers bergers, quittons ces plaines,
Partons sans différer.
Un Dieu vient briser nos chaînes,
Allons tous l’adorer.
Puisque l’ange a parlé,
Allons à Bethléem, car c’est là qu’Il est né !
Allons-y tous, ne soyons point surpris
Qu’un lieu si misérable,
Qu’une pauvre étable,
Qu’un lieu si misérable,
C’est le paradis.

Scène II

Sambé et Tiennette

Sambé

Mé grand Diu que donc qu’on intind per itchi ?... Chocun se réjoÿ ; on intind que chanto, dansi, sauto, cabriolo de tous coutos… Toté les gins de nontron villageo de Vaugneray sint dins n’un trepignimint qu’on ne pot arreto… Yétait qu’un roi vindrot au monde pa meno tot cé tintamore ?...
O fôt que j’allo trovo lo pore Gottabidaud, lué qu’est curiu d’apprindre de bonnes novelles, celaqui sera bien bonna à y apprindre.
Et pu a l’é savant lo pore Gottabidaud, lué qu’é into à l’ecola guère moins d’ina saison… Vore incore, quand lou zacadémiciens de Lyon s’assimblont pa parlé de la plévi et dou biau timps, o yé lu avoué ina granda triqua que chapote lou zécolies que font de bré.

Il frappe à la porte de Gouttebidaud.

Pore… Pore… A ne répond po le pore… Je crayo qu’a lé sord, ou qu’a se metto de coton dins lo trous de lé zorilles…
Pore… Pore… Je voué vo conto ina granda novella…

Tiennette, à la fenêtre

(Avec rapidité) Que donc que vo z’y volo au pore ?... Veni vo dija charchi Benoit pa bère ?... O n’y était po assez de bère lo jor sins bère incore la né, soulo que vos étes, ivrogne, sa à vin, pilis de cabare, que n’in sorti que pa y rentro ; et pu quand vo reveni à la maison, o n’yé que po battre celé poure maleuleuse de fenne.

Sambé

Min non… min non… ma poure amie, je ne veno pas le charchi pa bère ; je veno li apprindre ina bonna novella qu’a sera bien aiso de savère…

Tiennette

Dans cé co attindi lo ou coin de la roua, m’intindi vo bien… (elle ferme la fenêtre)

Sambé

Eh bin, mes braves bonnes gins, la ivo bien intindue… cela fenne aqui… Tairet, tet, tet, tet, tet, tet… O ieto comme lo molin de Pinay… L’attindre ou coin de la roua… Je m’in vouai l’attindre ou coin dou feu… O vaudra bien mieux par mé… (En s’en allant) Je ne sais bourgne, ce que devint cela drolessi de fenne aqui… Que le bon Diu la rapatafiole…

Scène III

Gouttebidaud, seul

Qué mauvais hiver… Depu lo timps qu’o no faut mingi lo pain sué, je son de gins d’un bien pouro métie, moins gros qu’ina chuvra, mo habillis, mo norrés, mo logis… Mingi un pou de corle mélangie avoué un peu d’aiga, un pou de sopa à l’ignon, vétia la via de celo poure vigneron de Vaugneray… Min o n’y est pas tot… Ce qui me fait incore le mé soffré, o yé que j’ai ina sola fenne que me fait bien de misères, sins compto le peines… la gaillorde pa sou caprices et sa mauvaisi humeur mette tojor lo ménageo sins deussus-desso… Je ne sais bourgne pas ce que le devint cela fenne aqui… Lez autrevai quand j’étians plus jeuno o yiétié toujor : mon poure homme per iqui, mon poure homme par lai… Vore, elle ne revint po inavai à la maison sins qu’elle ne dise : chin d’ivrogne, pili de cabare… Hier lo sai, sins allo plus loin, je rintrovo de la vigne tot moilli, tot trimpo de suageo, je ne sayins po seulement ou que poso ma piochi, la fenne n’étien pa à la maison… Elle rintre, eh bin tot in rintrant, elle me dit : Te vétia chin d’ivrogne, te n’o incore rin fait vué, féniant… Elle me det ivrogne, me que je n’ayiens dans la pansi qu’ina gotta de piquotta et un pou de sopa à l’ignon que j’ayiens mingi à mijor… Elle me det féniant, me qu’ayiens piochi dins ma jorno mes dueu bonnes bicherées… Enfin, j’ouvro la maison : que donc que je voyo dedins ? Lo coïvo d’un couto, l’arrosou de l’autre, lo crosson de l’éfant au biau mitan de la chambre, et lo pot de chambre qu’étient incore tot plein de la vielle… Si lo bon Dieu ne m’aye po retenu, je y ariens foutu un bon coup de piochi à dueux mains darri la têta que y are fait viri la têta dou couto de la chapelle de Saint Bonne… Et pu, ce pore Sambé que me det toujor : Pore, elle est jouèna, elle est jouèna… O yé bien parce qu’elle est jouèna que faut la rossi su les épales, y foutre ina bonna ciaqua su le no et y forma un caractèro tot autre que celé qu’elle a ; que faut l’impechi de s’occupo de tant de chouses qu’amenont la brouilli dins le ménageo et fant viri la tèta dous hommes. Ah me braves gins, je n’ariens jamais finé si je vouyiens tot vo raconto… Mé in parlant de chouses et d’autres, y m’ont det que le pore Sambé ayait ina bonna novella à m’apprindre… Dame… cella novella me donne bien de tracas et bien de socis…

Scène IV

Gouttebidaud, Sambé

Sambé

Eh bonjor, Gottabidaud…

Gouttebidaud

Eh bin !... Pore Sambé, je te souhaite aitot bien lo bonjor. Lo proverbe n’est po faux quand on det qu’in parlant dou loup, a sort dou boué…

Sambé

J’ai ina bonna novella à vo apprindre…

Gouttebidaud

Dame, parlo… je vos acote…

Sambé

Imagino vo donc, Benoit, qu’ou biau mitan de la né, j’ai éto révilli pa ina symphonie le plus agrioble. J’ai vu passo ina tropa de biaux éfants, qui étiant parchis su de nioles et que chantovont de cantiques du plus biaux. Je n’ai rin fait que de viri la tèta : je lou ai pardus de vuya, je ne sais bourgne po ce qui sont devenus…

Gouttebidaud

Mais vo ne m’appreni rin de nouveau, pore Sambé. Je me sué vu comme vo révilli cetta né pa ina musique de le plus agrioble. J’ai passo la tèta in dihors de la fenêtre et j’ai vu la luna qu’itiait ma fa plus bella que lo solé dins lou grands jors. Oh… oh… je me sué det o faut que y aille quoque chousa de noviau. Oussitout, j’ai metto mon biau complet de le grandes fêtes, et je sué monto a la Maletirie. Je ne sué po arrivo ve le permires maisons que je voyans comme vo ina tropa de petits anges qui criovont la pais su la terra :
Ils voltigeovent su le nioles
Et volovont comme le vint ;
You vètemints etiant blancs comme neige
Et reluisient pa l’or et pa l’argent.
Y l’ont fait de si bella musique
Que j’en étiens tot aibobis ;
Y entonovont me simble in cantique
Que disait : Gloria in excelsis.
Intre autres j’in ai vu un tot petit quétient habilli tot comme lou ciergeons dou grand Saint-Jean de Lyon. Y vo entonnovont de ré mi fa et de sol fa mi que j’in ai eu lo cœur tot réjoyi. Y ne se sont po mêmo arreto un petit momint pa mettre d’accord you zinstrumints ; et tot d’un coup à grands coups d’arches y intonillont ina bella symphonie : de presto, de subito, de allegro, de andanté, il n’y ayait rin de si biau. You chef étient pa darri, que faisieut viri son boton diqui, dilai, à draiti, à gauchi. J’ai bien eu pou à in momint qu’a ne donne in bon coup su le zorilles dou plus petit, mais y étient pa redressi you musiqua. O ayient de trompettes que faisiant mé de bré que lou quatre vints, quand y sofflont bien fort. D’autro placés dou couto de l’orient fourgonovont avoué des arches de ion… ion… ion… que faisiant crevo li monde de rére. O faisiant tant de bré dins nontron villageo de Vaugneray que nontre bargis et nontre bargeires de Montferra, de Roche-loui et dou Jumiaux s’en alliont tot plan pa charchi ina explication à ce mystero… Qué dommageo que tot icin étiait in latin, on n’y comprenio gotta…

Sambé

Vétia bien de zaffaires… Je n’y compreno rin aitot, je sué incore moins instrué que vo…

Gouttebidaud

Si vo étiot de mon avis, pore Sambé, teni… voyi vo bien cela maison qu’est là planto, pé iqui dins lou rochi, dou couto de Pira-Ronde ?

Sambé

Pardie… mais o yé la maison du frore Blaise…. Vo le connaissi donc aitot ?...

Gouttebidaud

Si je le connaisso…. Yé yien de mou zamis. O yé in saint solitero, qu’on det qu’intind l’astrologie. Je sué bien sur qu’a no dira ce que tot icin signifie. Si j’allovons lo trovo.

Tous deux

Vins y… Vins y…
(chanté)
Allons trovo lo solitaire
Qu’on det qu’intind l’astrologie,
Je l’y dirant in dueux mots nontr’affaire
Et je varant si j’ont bien songie.

Gouttebidaud

Pore Sambé, mon poure ami, preni bien gorda de chere, o ya peu iqui de tarri de lapins… Et pu vétia celou petits galapias d’ecolies de Vaugneray que no fichont de boles de nogie… Ouf, in vétia ina juste darri la tèta… Mon Diu… mon Diu…

Sambé

Eh bin, mon pouro cher ami, o vo tindra chaud peu c’ta né.. Ouis… qué coup je me sué donno au biau mitan de la chamba… ouais…

Gouttebidaud

O vo apprindra à vo foutre ainsi dou monde. Mais o n’yé pas tot. No vétia arrivo à la porta de sa cellule.

Sambé

Eh bin, pore Gottabidaud, impogni lo pie de bichi…

Scène V

Gouttebidaud, Sambé, le Solitaire

Gouttebidaud et Sambé

(Chanté)
Drin, drin, drin, monsiu l’astrologue
Ouvri no donc pa in momint
Je veniant vo raconto in prologue
Que fatigue nontron intindemint

Gouttebidaud

Je ne sais po si lo gaillors dort, ou bin si a fait lo sord… O no faut sonno incore in coup…

Gouttebidaud et Sambé

(Chanté)
Ah, j’infonceran voutra porta
Ouvri no donc présintamint ;
Si vo reveni pa charchi l’aumona
Sins rin donno no vo renvoyerant.

Gouttebidaud

Quaisons no, je crayo que lo gaillord gratte à sa porta…

Sambé

Oh lo viu… Que de maux a l’a pa ouvré.

Le Solitaire

Qui vient dans cette solitude
Pour y troubler un pénitent
Qui jour et nuit s’appliquant à l’étude
Dans sa cellule a l’esprit très content.

Sambé

Ouvri in pou voutra porta. Je sué Sambé m’intindi vo ? Que faites vo din voutra cellule, pendint cé timps que chocun est levo.

(Le Solitaire ouvre)

Gouttebidaud et Sambé

(Chanté)
Bonjor donc, bonjor frore Blaise
Vo zailli bin maux à ouvré,
Aviso donc, n’ètes vo pa bin aise ?
Voyi vo bien cette étèle que lué.

Le Solitaire

Que vous plait-il ? Que faut-il faire ?
Minuit va frapper au moment,
Pourquoi troubler un pauvre solitaire
Qui priait Dieu très attentivement.

Sambé

Mais frore Blaise, je ne venons po pa vo troblo : yé lo pore Gottabidaud et pu mé aitot que venons.
Dir’ina novella
Que vo n’ailllis po intindue,
On vait ou ciel na bella étella
La plus bella, que je n’en jamais vue ;
Et su le nioles on distingovont,
Chantovont de petits éfants,
Dessus lo village y volovont
You concert étié captivants.
De poures vignerons comme no ; je n’y comprenons gotta et je venons vo demando de zexplications su tot ce qui cin vou dère.

Le Solitaire

Allez, allez faibles mortels, vous et moi nous sommes trop peu instruits pour lire dans le secret des cieux. Retournez chez vous, ayez plus de foi et vous serez plus heureux.

Sambé

Ah vo crayi cin, fror Blaise… Mais passo donc voutre tèta dihors de voutra cellule, preni donc voutron grand tuyau…

Aviso donc, n’ètes vo po bien aise ?
Voyi vo bien l’etella, frore Blaise.

Le Solitaire, sortant avec sa lunette

Jésus la charmante lumière…
Que je suis heureux de la voir,
Ce n’est pas là l’étoile matinière
Cet astre ici, ne se peut concevoir.
Permettez mes enfants, que j’aille consulter mes livres, et dans un instant, je reviendrai vous dire ce que cet astre signifie. (Il rentre)

Gouttebidaud

Allo, allo, frore Blaise et ne demeuro guère car o no fait po chaud per iqui ; ina hura à voutre porta est préferable à dueux ; et pu lo frè de la saison fait crinci le dints et cope la respiration… Pore Sambé mon ami, quand sa porta é into ouverta, qu’ayez-vo vu ?

Sambé

Je n’ai rin vu…

Gouttebidaud

Eh bin, pore Sambé, dou timps que vo causio ou frore Blaise, me j’ai aviso dins sa maison. Je sué bien sur que lo frore Blaise est lo plus fin astrologue de tous nontron villages, car j’ai vu vé lué de compos, de zequerres, de rabots, de serres, de volets, de cisieaux, de zétablis. Je ne sais si frore Blaise é ménouési ou si tot icin fait partia de l’astrologie ; et pu au biau mitan de sa chambre dessus ina tota petita tobla ronda, j’ai incore vu ina bella sphera…

Sambé

Na ceviri… Que donc que fait d’ina ceviri dins sa maison ?

Gouttebidaud, riant

Comme donc, pore Sambé, in hommo de voutre age, vo ne sayi po ce qu’o yé qu’ina sphère ?

Sambé

J’ai toujors intindu dire qu’ina ceviri o yétié avoué cin qu’on portovo lo fumi…

Gouttebidaud

Oh… oh…. Mon Diu… mon Diu… Comme donc vo qu’ayi étudii lo latin jusqu’à tic et toc, vo ne sayi po ce qu’o yé qu’ina sphera. Teni mon poure ami, pé que vo ne fassio po de balourdises, je m’in voué vo l’expliquo :
O yé une machine
Pa vère lou mouvement dou ciel
Lou tors que fant dessus nontre hemisphère
Lo biau solé, la luna et le zetelles
Que brillont au dessus de nontra terre
Et pu cetta bella bola ronda
Qu’étii planto au biau mitan
Représenta la terra et l’onda
Outor douqual vire lo firmament.

Sambé

Taisi vo donc a nos acote,
Avisa la mina qu’a fait
Intre se grindes dints seul à barbotte
A simble à in singe ses besicles aux daits

Le Solitaire

Heureux mortels, c’est là l’étoile
Qui doit conduire les seigneurs ;
Et qui sera le guide très fidèle
De ces trois rois qui vont voir le Sauveur.
Suivez, suivez cette lumière…
Ou elle se reposera
Et finira cette nuit sa carrière
Dans cet endroit votre Sauveur sera.
Adorez-le c’est votre Maître
Offrez-lui vos cœurs pour présent ;
Il vient pour vous, allez le reconnaître,
Vous le verrez dans un grand dénuement.

Gouttebidaud, Sambé

(Chanté)
Diu vo lo rinde frore Blaise
Et vo donno lo paradais
Mon poure cœur est tot réjoyi d’aise
J’érans vère, bonjor, adiu vo dais.

Scène VI

Gouttebidaud, Sambé et Tiennette

Gouttebidaud

(Chanté)
Lo fror Blaise a det bonna novella
A det qu’in Diu vint de naitro por no
Je poyo po in dire ina plus bella :
Petits moutons sayi tout rassuro.
(Riant)
Pore Sambé, mon poure ami, ne vo ai jo po toujors det qu’o y ayé mé d’esprit dins cela vieillie tèta pleina que dins lo borgs de Brindos, Messimy, Yzeron et pu Craponne…

Sambé

Jou sais bien. Mais sayi vo bien que depu que vo ayi appré cela bonna novella, j’ai bien de maux à vo suivre ; vo cori comme na livra…

Gouttebidaud

Ah jou sais assez, cela novella m’a rajeuné de vingt ans… Mais sayi vo bien ce que no faut faire ? O no faut d’abord allo charchi nontra Tiennette et y dire de vené faire son adoration avoué no…

Sambé

Oh… Yé bien ina bonne idée, mon pour ami. Si lo bon Diu poye y changi lou sentimints et qu’elle ne grogne plus tant quand je beuvans nontra botilla, sayi vo bien que j’arans assez gogni ?...

Gouttebidaud

Ah …O faut que je l’appelle depu tchi, car o se pot bien qu’elle ne saye po à la maison…
Tiennette, ma bonna fenne… Tiennette…
Eh bien, ne vo aijo po det qu’elle n’étie po à la maison ?... Je sué sur qu’elle est pet itchi vé sa vésina Périne ou vé la barbelle de Jeannette qu’elles porlont et de l’un et de l’autre, brule peut-être son cotillon ou coin du feu… Voyons vère, je voué l’appelo incore in coup… Tiennette…

Tiennette

Plait-il… plait-il Benoit…

Gouttebidaud

Eh… plait-il… plait-il… bajafla que t’es… Oncque t’étiot que te n’étiot po à la maison ?...

Tiennette

Oh… mon pouro Benoit, o ne faut po tant crio… Yétié la vesina Perine qu’étié venoie me charchi pa faire de la sopa à son efant… Je y ai aidie in pou et pu j’en déjeuno tout tré à la vai…

Gouttebidaud

Vo ayie déjeuno tous tré, bajafla que t’es… Je sué bien sur que vo ayie bu ton vin de Planche-Bille ?...

Tiennette

Oh mon Diu… Benoit, je n’ai rin bu qu’ina petita gotta ou fon d’ina sillota.

Gouttebidaud

O faillie in bère ina sille, bajafla que t’és… Mais je volo bien incore te pardonno pa ce coup… Apprinds ina bonna novella. O yé que le doux Jésus est venu su lo tord pa te rachito dou péché originel… Je sué bien sur que t’o incore lo pépin de la pomme que t’etranllie… bajafla que t’es… Possa davant me et pu te mettré ton biau devanti rogeo à bavetta et ton biau grand manteau bien fourro…

Tiennette

Et la Toinette, que donc que je n’in farai ?...

Gouttebidaud

Te y mettré sou biau zaffaires de sa permiri communion et te l’amenarai avoué te…

Tiennette

Elle est enrhumo et j’ai bien pou qu’elle prenne ina pleurésie…

Gouttebidaud

Oh la poura drola, j’en ai bien pidia aitot… Te la laisserai à la maison…

Tiennette

Oh Benoit…

Gouttebidaud

Que donc qu’o yé ?...

Tiennette

(chanté)
Si te sayo que de gins
Que sont dija in chemin…
Chocun y porte in présint
Et du millou de son bien ;
Je crais que te fario bien
D’y porto des vétemints.
Chantons bien tous réunés Noyé… Noyé…

Gouttebidaud

Et parque faire de zhabillements, que ne sont bons que quand lou zefants coront dihors ?...

Gouttebidaud et Sambé

(chanté)
Me je volo y porto
Na barille de mon vin,
Et in isiau que j’ai tuo
In revenant dou molin,
Ina paire de pios,
Et in panie de gotios
Chantons bien tous réunés Noyé… Noyé…

Fin du premier acte

Deuxième acte

Scène I

Les Bergers, arrivent

(Chanté)
Tous les bergers de nos villages
Ont abandonné leurs troupeaux ;
Pour rendre au Seigneur leurs hommages
Ils sont sortis de leurs hameaux,
Sans crainte qu’en leurs bergeries,
Le loup cruel et ravissant
N’égorge, au milieu des prairies,
Quelqu’un de leurs agneaux paissant.
(Ils font leur adoration)
Au pied de ton sacré berceau
Un tendre amour nous jette
Fais naître en nous un cœur nouveau
Une flamme parfaite…
Divin Enfant, céleste Roi
Accepte nos hommages,
Et de l’ardeur de notre foi
Prends ce tribut pour gage.
(Ils se retirent lentement)
Regagnons, bergers, la plaine,
Allons revoir nos troupeaux
En chantant l’Etre Suprême
Qui pour nous naît au berceau.
Regagnons, bergers, la plaine,
Allons revoir nos troupeaux.

Scène II

Gouttebidaud, Sambé, Tiennette

Gouttebidaud, entrant

Mais vais-tu, bajafla que t’es… Me que comptovo être lo parmi pa faire mon adoration à l’Enfant Divin, et vétia de petits bargis que n’in sortont dija…

Tiennette

Mais Benoit… je vos ai suivu ; je suiviens, je crayo…

Gouttebidaud

Pore Sambé, mon ami, faisans nontron adoration tous trais à la vai, et surtout tochon de bien nos accordo…

Sambé

Je volo bien…

Gouttebidaud, Sambé, Tiennette

(Chanté)
Qu’a l’est biau dins la lumierie
Dins cela poura écurie,
Nontron Sauveur et nontron Prince
Quétii couci dessus ce foin,
Lué qu’a de mille de provinces
Est rédué dins n’in petit coi.
Prosternons no et l’adorons
Baisons sou pies et l’honnorons
Comme nontron souverain Maître
Puisque vo veni tchi por no,
Faut être fou ou bien in traitre
D’in aimo in autre que vo.

Gouttebidaud

Petit Enfant qu’êtes venu su la terra pa no sauvo, no délivro de la guerra, je veno me presento pa vo demindo de nos invoyi lo biau timps et de faire arreto lo maux de le poure gins et surtout dou poures vignerons…
(A Tiennette) Tiennette, ma bonna amie, je veno de faire mon adoration, la bienséance vout que te fasses la tia… et surtout ne vais po dire de bétises à ce Divin Sauveur…

Tiennette

Oh… N’ayi pas pou, Benoit, je voué y dire tot ce qu’o faudra…
Petit Roi que vint su terra
Incore que vos n’ayi gein
D’autre train, ni d’autre embarras
Que de bétes et que de fin,
Je veno vos reindre hommageo
Et la paix je vos demindo
Dins nontron ménageo.
Faites que Benoit saye plus sageo cti an que totes le saisons passées.

Gouttebidaud

Porla par te… et taisi te pa los autres…

Tiennette

J’ai incore in petit mot à dère…
(Chanté)
Dama Marie
J’ai bien de chouses à dire
Dama marie, acoto je vos prie
Mon Benoit bet trop, a l’é toujors ivre
Quand a rintro à la maison.
Toujors, toujors me fout de gnons.

Gouttebidaud et Sambé

(Chanté)
L’intindi vos Yena têta de mule
L’intindi vos le pioye trop
Elle é éto à l’ecola à le Zursules
Elle n’a rin appris
Mon Diu, mon Diu, elle n’a gein d’esprit.

Gouttebidaud

Ah ! bajafle que t’es, te vins incore dère de bêtises à ce divin Efant, po me faire mo volai dou bon Diu…

Tiennette

Oh !... Que donc que j’ai det ? Que vo beuvi la gotta, que vos étio de zivrognes et que vos donnio toujors de coups à voutre fenne ?... Je n’ai rin det d’autre que la vérito…

Gouttebidaud

Ah !... Te n’o rin det que la vérito, bajafle que t’es… Eh bin té importe incore cellaqui de vérito… (Il la frappe. Tiennette sort en courant)
Eh bien, pore Sambé, l’ayi vos bien intindue cella bajafle que s’en vint dire de zinsultes à ce l’Efant divin ?...

Sambé

Mais bien sur que je l’ai intindue, mais faites attintion Gottabidaud que cela poura drolessie est bien plus jeuna que vos ; elle se fara, elle se corrigera… O yé bourgne po in la rudayant de cela façon que vos y farez changi lou sentiments…

Gouttebidaud, en colère

Vétia toujors voutron refrain : elle est jeuna, elle se corrigera… Je vos dio qu’o yé bien parce qu’elle est jouena qu’o faut y rossi le zépale (pa) playi lo sauvageon des qu’a l’é ou monde.

Sambé

Mon poure ami, vos n’in ferez bien ce que vos voudrez, cinqui voyi vos, le zafaires de ménageo o ne me regorde po, intindi vos bien…

Gouttebidaud, plus calme

Poure Sambé, la Tiennette est tote de mauvaise humeur, je sué bien sur qu’elle ne no fara rin cuire pa nontron réveillon… O faudra vos in allo à la maison, vos troverez dins lo coin dou buffe dueux ou trais grillades et in bot de bodin que vos mettrez ruter su lo gril… Et pu vos érez à nontron cava, au traisieme tonnieau et vos tirerez quoques chopines de nontron bon Planchi-Bille… Faites bien attention que lo chat ne mette la patta su nontre grillade ; je porriens nos appelo Monsiu de Passa te n’in…

Sambé

Oh Gottabidaud, quant ou sujet dou chat, si a y mettove la patta, je prindriens le pincettes à dueux mains et je l’y in foutriens in tel coup su le darri que d’un bond a sauterent jusqu’à Chatanay…

Gouttebidaud

Je sais bien que quand o s’agit dou gosi o yé po de jueux d’efants, vos êtes toujors lo parmie. Allo, allo, pore Sambé, me je voué me teni dihors, pa vère lou biaux adorateurs que vindrant adoro l’Efant divin, le biaux présents qu’y vont y apporto et ce qui vont y dère…

Scène III

Sœur Pauline et Gouttebidaud

Sœur Pauline

(Chanté)
Agréez nos humbles services
Acceptez nos bras et nos cœurs
Chez nous, professes et novices
De vous servir brûlent d’ardeur.
Mais si vous quittez cette étable
Vous nous serez toujours présent
Nous vous verrons, Sauveur aimable
Dans l’orphelin, dans l’indigent.

Gouttebidaud

Oh !... oh… ma bonna sœur Paulina, o yé in plaisé de vos vère et in charmo de vos intindre. Je comptovo bien vos intindre parlo, mais vos ayi chanto si bien que j’in ai lo cœur tot réjoyi ; vos ètes pa mo fai, musicienna jusqu’ou bot de les zonyes.

Sœur Pauline

Allons Gouttebidaud, c’est très flatteur de votre part… Mais dites-moi, mon ami, il y a longtemps que nous n’avons eu le plaisir de vous voir. Il vous faudra venir dans notre sainte maison et en même temps visiter nos caves…

Gouttebidaud

Allo vère voutre cave tant que vos voudrez, mais dins voutra sainti maison, ah… je m’in gorderiens bien…. Je me rappello bien de la faussa pleurésie que j’ai yeue l’an passo darri lou talon. J’ai bien manquo de n’in ciaquo. On sat assez bien quand on y intre dins voutra sainti maison, mais on ne sat po toujors quand on in sort, sovint o yé que lo pies lou parmies.

Sœur Pauline

Allons Gouttebidaud, vous êtes toujours causeur comme à votre ordinaire. Mais je ne puis m’arrêter davantage ; mes malades réclament mes soins… Aurevoir, mon ami, aurevoir Gouttebidaud.

Gouttebidaud

Ayi bien soin, ma pora bonna sœur, de tous voutes malades… mais surtout dou poures vignerons… Allo… allo, ma poura sœur, jamais je ne vos oublierai dins me pryières dou sa et dou matin. Je mein rappelo bien de l’an passo me poures bonnes gins à ce grand Hotel-Diu ; celou médecins me disiant toujors : Diéti.. Diéti… Sayi vos bien que diéti, o ne vos remplit po la pansie. Je preniens mon pot de tisane et je you lo invoyo à la têta té vétia pa ta diéti. Mais cela bonna sœur Paulina me disiait toujors : Alons Gouttebidaud, prinds patiencie ; vétia ina coussie de polaille et ina petita chopina de Biaujolais… Avoué celles friandises je preniens pa ma fa, ina patiencie d’ange ; j’étiens maigre comme ina chura… quand j’intré dins l’hopiteaux, mais avoué lou bons soins de cela bonna sœur Pauline, quand j’in sué sortu, in pou mé o yale fallu ouvrir la granda porta dou domo, à cause de la pansi que j’ayiens pré…

Scène IV

Gouttebidaud, l’avocat Bertrand

Gouttebidaud

Je ne sais foutre po ce que j’intindo ; je compto qu’o yé in hommo de justici que vint pa verbalisi devant ce Divin-Efant… Si je sayiens je prindriens ina triqua et je y casseriens… Oh… pa ma fa, nénni me bonnes gins, o yé Monsiu l’avocat Bertrand, in hommo de granda éloquenci ; quand o parle à l’audienci, tot chacun ne quoèse pa l’intindre… O faut que je me retire dins mon petit coin pa miux écouto…

L’avocat

(Chanté)
Dans cette étable
Que Jésus est charmant
Qu’Il est aimable
Dans son abaissement.
Que d’attraits à la fois
Tous les palais des rois
N’ont rien de comparable
Aux beautés que je vois
Dans cette étable.

Gouttebidaud

Oh… Monsiu l’avocat, voutre ninstruction est de la plus sogna… Dame, su voutra mina on vèt bien que vos n’ayi po toujors viri outor dou collège sins y rintro dedins ; cinqui pa ma fa voutre néloquenci est bien repasso su la mola. Vos veni de faire iqui in adoration de le mieux que j’ai intindue, je donneriens bien douze botons de ma culotte pa l’avé retenue…

L’avocat

C’est très généreux à vous Gouttebidaud, mais dites moi que faites vous donc là ?...

Gouttebidaud

Je sué iqui de gorde, Monsiu l’avocat, de crainti qu’on ne venne faire de zinsultes à ce Divin-Efant.

L’avocat

Très bien, très bien, mon ami, Dieu vous en récompensera un jour. Aurevoir Gouttebidaud, aurevoir…

Gouttebidaud

Mais Monsieu l’avocat, dou timps que je sons iqui que nos dueux, o faut que je profito de voutra présenci. J’ai in avis à vos demindo…

L’avocat

Parlez Monsieur Gouttebidaud.

Gouttebidaud

Vétia ce qu’o yé Monsiu l’avocat. J’ai vindu l’an passo in petit morciau de vigni à in pouro vigneron comme me ; lo gaillord ne m’a varso quin petit acompte ; a m’aye portant bien promis de me payi le 5…) à la Saint-Martin ; la Saint-Martin é passo et je n’ai po incore vu sou yards. Vo sayi (…) bien Monsiu l’avocat que dins nin (meti ?) comme lo nontro, lou gros sous fant(…) assez besoin à la maison. In consequint je voudriens vos demando in avis pa faire payi mou dueux ou très sous…

L’avocat

Eh bien Monsieur Gouttebidaud, mon cher ami, c’est une chose très facile ; mais vous pensez bien que le lieu et l’heure ne sont pas propices ; venez demain dans mon cabinet, sur les huit heures du matin, nous éclaircirons cette affaire et je vous donnerai un avis salutaire pour attaquer votre voisin (selon ?) les points.

Gouttebidaud

A huit heures dou matin… Yé bien ( ?) pa dejeuno avoui vous Monsiu l’avocat. Vos étes pa ma fa bien honnête ; j’accepto bien volontie, d’autant mieux que je ne refuse jamais rin.

L’avocat

Oui Gouttebidaud, mon cher ami, cela me fera plaisir ; venez, nous déjeunerons ensemble ; au revoir, mon garçon…

Gouttebidaud

Mais Monsiu l’avocat, je ne sué po de cele gins que fant le chouses à mètia. Je voudriens savè combien celo avis me coutera…

L’avocat

Allez, allez, Monsieur Gouttebidaud, entre nous, nous nous arrangerons bien…

Gouttebidaud

Oh… oh… Que nénni Monsiu l’avocat, je sais que vos ayi de plumes que plumont assez bien… Quand vos ayi griffono ina ou dueux pages de papie, vos dites : o yé tant, o n’y a rin à rabattre. Mais par me, que volo in avère lo cœur ciar, je voudriens savé combien voutro n’avis me coutera.

L’avocat

Eh bien, Monsieur Gouttebidaud, puisque vous y tenez, voici…

Gouttebidaud

Parlo, Monsiu l’avocat, je sué tot orillie.

L’avocat

Un avis vous coutera un louis d’or…

Gouttebidaud

Un louis d’or…

L’avocat

Et par écrit deux louis d’or… Aurevoir mon garçon…

Gouttebidaud

In louis… Dueux louis… Gardo, gardo voutri navis ; pa ma fa je m’in passerai…

L’avocat

Gouttebidaud, mon ami, rien n’est si beau que le passe-t’en… (Il sort)

Gouttebidaud

Ah je crayo bin que je m’in passerai… Chin de renégat, chambre d’hypocrite, bouffre d’escogriffo… Dueux luis, me qu’avoué dueux louis vivo in an, avoué ma Tiennette, et beuvo quoque chopines avoué lo pore Sambé… Ah o ne m’étonne po si a porte de biaux rabats blancs, de robes à queue… Quand t’o plumo dueux ou trais vignerons, t’o d’abord fait d’in avé( ?) d’autres… Dueux louis, je volo ou dire à totes celles bonnes gins que te la baille bonna, mais que te l’o fait bien payi… Dueux louis, avoué deux, trais avis, t’ério d’abors fait d’avalo la vigne et … pu incore lo vigneron…

Scène V

Gouttebidaud, Jeannette

Gouttebidaud

Mais que donc que j’intindo… Oh yé cella poura mère Jeannette, qu’é interro son homme o ya quinze jors… Elle a un rhume que sint bien lo sapin… Voyons vère ce qu’elle vint dire à ce Divin-Efant….

Jeannette

Ce que c’est que la caducité de l’age…(elle tousse) On n’a pas tort de dire…(elle tousse) Si jeunesse savait, si vieillesse pouvait…(elle tousse) Ah combien il me tarde d’arriver à la crèche, cet aimable Enfant, qui guérit tous les maux.
(Elle fait son adoration) Ah mon doux Jésus, vous qui êtes venu sur la terre pour racheter tous les hommes, daignez, s’il vous plaît, m’envoyer mon ( ?) le plus tôt possible ; car depuis la mort de mon pauvre mari, je suis toujours mélancolique et ( ??)

Gouttebidaud

Vos ayi perdu l’appétit… Mais poura mère Jeannette, yé bien tant mieux…

Jeannette

Et pourquoi Benoit ?...

Gouttebidaud

Ah ma pora chère amie, le denrées sont si chères ; o ne vo coutera po tant pa vivre…

Jeannette

Grace à Dieu, jusqu’ici, je n’ai rien demandé à mon voisin…

Gouttebidaud

Cepindant vos ayi in rhumo que sint bien lo sapin, et je compto que si on n’y porto in prompt remède… j’ai bien pou que vos n’ailli d’abord habito dou couto dou Couvent-Vieux…

Jeannette

Ah Benoit, au lieu de me plaisanter, vous feriez mieux de me donner une recette pour me guérir de cette vilaine maladie… Il y a de ces petits remèdes bon marché, qui font tant de bien…

Gouttebidaud

Mais ma poura chère amie, yé bien mon intention de vos donno ina recetta… au moins peu l’adoration que vos ayi fait… que n’est ma fa, ni de plus belle, ni de meilleures… Eh bin pa vontron rhumo, vos prindrez cinquante grammes d’humilito, ina oncie de patiencie, in paquet de gromin, et pu vos mettrez tot icin dins na pomma reneitta copo in quatre… Vos mélangerez le tot dins la casserola de la pénitencie, de façon à faire ina bonna métio… Vos prindrez ina petita cuilleria lo matin et ina petita cuilleria lo sé… Si o ne vos fait po de bien, o ne vos fera po de maux… Mais vos ferez la chiqua à l’apothicaire, vos donnerez la fuita ou médecin et l’impatienci au chirurgien…

Jeannette

Ah vieux fou, vous ne savez pas ce qui vous arrivera… Si on peut arranger comme ça les vieilles gens !... (elle sort)

Gouttebidaud

Allo, allo, villie barbelle…A voutre nageo, vené demando incore in hommo à la crèche… Je voué t’in commindo yienne hommo me, vé lo ménouisie qu’é darri vé no… intre quatre belles planches… Eh mon Diu, mon Diu… on ne sat po ce que songeont celle villie barbelle… On n’a po tord de dère quand lo feu est dins la villie buchie…

Scène VI

Gouttebidaud et frère Damase

Gouttebidaud

Mais que donc que je voyo incore per iqui ? Eh mon Diu, o yé ce bon frore Damase que sat si bien priyi lo bon Diu… A l’é bel et bien chargi vué… O faut que je me mette in petit pou à l’écort pa miux l’intindre et ne pas le gèno…

Damase

Hélas grand Dieu, que la vue de l’homme est dure aujourd’hui… Combien il est pénible de gagner sa misérable existence… Hélas, c’est que tout mortel est né pour souffrir… Mais combien je vais être dédommagé par la présence de mon Sauveur… et que je me fais de joie de l’adorer…
(Il fait son adoration) O mon Sauveur et mon Dieu, vous qui avez voulu naître dans une pauvre étable, pour nous montrer la pauvreté, l’humilité et les souffrances… daignez jeter un regard de commisération sur cette vallée de larmes. Protégez la veuve et l’orphelin, donnez le pain à ceux qui n’en ont pas, et répandez vos bénédictions sur tous les malheureux et sur moi en particulier… Ainsi soit-il.

Gouttebidaud

Oh mon poure frore Damase, comme vos prayi bien lo bon Diu… Yé in plaisé de vos intindre… Mais donc vos veni donc ?...

Damase

Hélas Benoit, je viens de Grézieu jusqu’à Vaugneray faire ma tournée comme à l’accoutumée, pour chercher l’aumône des bonnes gens…

Gouttebidaud

Oh jon voyo assez… Mais que rapporto vos donc qui dedins ?... De pais, de foves, de fiégeoles, ina piota, de bon burre frais ?... Eh, eh, frore Damase tot icin qui est bel et bon dins la maison…

Damase

Hélas… Vous vous trompez mon frère… Maintenant on ne trouve guère que des cœurs durs, des êtres qui vous rebutent et ne vous donnent rien.

Gouttebidaud

Oh tot icin est bon à dère ; mais o y’in est po ainsi vué ; vos ayi pa ma fa ina figura rubiconda, que ne det po que vos ayi bu de la piquetta…

Damase

Benoit, c’est le cas de répéter ce vieil adage… On ne connaît pas le moine à l’habit, car tel que vous me voyez, je suis encore à jeun…

Gouttebidaud

Oh mon Diu, mon poure frore Damase, je vos demindo bien pardon de me drolerées… Mais vos allo bien vos restauro avoué cella bonna livra qui est dins voutra sacochie…

Damase

Vous vous trompez Benoit, ce sont quelques pommes de terre que frère Pierre m’a données en passant…

Gouttebidaud

Hé bien… in vétia bin incore in autra… de truffes qu’ant des orilles… Je n’in ai incore po vu comme icin, mais n’y a té po d’indiscrétion à demindo oncque vos allo ?...

Damase

Non Benoit. J’allais rendre une visite au solitaire de la Deserte, le pieux frère Blaise ; mais je suis vieux, rempli d’infirmités, je ne connais point les sentiers qui conduisent à da chaumière. Ah si je rencontrais une personne charitable, qui (pourrait me ?) conduire, je prierais Dieu pour elle…

Gouttebidaud

( ?) in peina dou paiement ; yé assez sovint ( ?) payi le gins avoué de prayières ; lou grous sous ne gotant po sovint voutron gousset… Mais o ne fait rin, je sué de tot cœur pa la bonne gins comme vos… Je voué vos y conduère tot de suétie.

Damase

Quoi, vous voulez bien m’accompagner ? Que de reconnaissance !... Je ne cesserai de prier la divine Providence, qu’elle répande ses bénédictions sur vous et sur les vôtres, et qu’à notre heure dernière, elle vous accorde la grace d’entrer dans la bienheureuse cité de la Jerusalem d’en haut.

Gouttebidaud

Mais lo plus tord possible, frore Damase, je ne sué po incore bien presso… Veni vos, veni vos ?...

Damase

Autant que possible je vous suis, mais les ans en ( ?) mon bon vouloir…

Gouttebidaud

( ?) yé bien tant pis par vos. O ne faye po vené ou monde si tout…

Damase

Hélas Benoit, je marche du coté de mon éternité. Que Dieu me fasse miséricorde… Je ne me repens pas d’avoir vécu…

Gouttebidaud

Ah je sais que vos sayi prayi lo bon Diu, mon poure frore Damase… Mais teni pusque vos vétia ou contor dou chemin, passo lo parmi mais preni bin gorde de chère, car o glisse vué. O y a bien de yacie et de yaçons… Oh qué vo preni bien gorde ou moins… Teni vétia sa (porta ?). Sayi vos bien qu’on n’intre po vé lué comme dins ine lisie… O faut chapoto, lo sonno, lo carillonno et pus quoquevai cela groussa tèta ne répond pos…

Damase

Allons Benoit, parlez avec plus de charité de votre prochain… Vous qui connaissez la maison, sonnez…

Gouttebidaud, sonne
Intindi-vos la joya ciochie ?...

Damase

Oui mon enfant, cette cloche est pour appeler les fidèles au Saint Sacrifice !...

Gouttebidaud

On ne pot rin vos dire, mon cher ami, vos ayi toujors la cheville pa bouchi lo trou.

Scène VII

Frère Blaise, frère Damase, Gouttebidaud

Blaise, ouvrant la porte

Benedicamus Domino…

Damase

Deo gratias, mon frère…

Blaise

Ah c’est vous mon cher frère Damase. Soyez le bienvenu, mon enfant. Nous n’attendions plus que vous, le frère Anselme et le frère Antoine sont déjà dans ma cellule… Entrez, entrez mes enfants… que la paix du Seigneur vous accompagne…

Damase

Benoit, mon ancien camarade, qui avez pris la peine de m’accompagner jusqu’au haut de la Deserte, entrez le premier, vous serez des nôtres… Nous allons réciter quelques prières, ensuite nous ferons un frugal repas pour nous remettre de nos fatigues…

Gouttebidaud

Oh… o ne fait rin, le repas frugal d’abord, le prayières vindrant assez après…

Damase

Mais Benoit, vous oubliez qu’on doit toujours commencer ses actions par la prière…

Gouttebidaud

Mais jou sais assez… ce que je vos disiens iqui o yétié pa rère…

Damase

Entrez, entrez, mon ami…

Gouttebidaud

Me intro, frore Damase, me intro lo parmie, je m’in donneriens bien gorda… Incore que je ne sué qu’in pourro vigneron, j’ai incore ina braisa de civilito… Dou timps que vos intro, je voué me reculo de trais pos…

Damase

Ce que j’en fais, ce n’est que par obéissance…
(Il entre et ferme la porte)

Gouttebidaud, tourné vers les spectateurs)

Mon Diu, mon Diu, comme nontra Tiennette vé avai grand regret, et dins qué réjouissancie elle sera quand je voué y dire : Tiennette, ma poura amie, j’ai rincontro lo frore Damase que m’a prayi de lo conduère à la baraqua dou frore Blaise… Et pus le belles chouses que je voué apprindre de tous celo gaillords qui… Cinqui ma fa, yé de gors d’in grand esprit… Y pourrant m’orno la mémoirie de yeu brillantes conversations… et Diu de Diu lo bon repas que je vans faire tous les quatre à la vai… Mais je compto bien qu’o yé à mon tor d’intro. O ne faut pos lou faire attindre……
Mais….. in vétia bien incore ine autra… Est-ce qui m’arient sarro la porta ou no…. ? Y’était bien pa de bon ?... Quoi, y m’ant sarro la porta ou no….. Frore Blaise, frore Blaise, vos m’ayi sarro la porta ou no ?... On qué lo lique ?... On qué lo pie de bichie ?... Ah lou chins maux nés… Y zant tot retiri… Attinds… attinds… je m’in voué aviso pa lo trou de la serrura… (Il se baisse)
Ah… mon Diu, qué creva-cueur… Vétia ce chien que je veno de conduire que dépouille sa livra, vétia lo frore Blaise que mette la tobla, vétia lo frore Antoine que rince lou verres, vétia lo frore Anselme que fait couire la grillade, et te poure Benoit….. Ah je n’in poyo plus… Lo got dou bodin que me monte ou no… la geula m’in deminge…..
(En colère) Eh bin ayi vos vu… Invoyi ( ?) de la sorta Gottabidaud, yien dou plus anciens vignerons de Vaugneray… Me que sué si bien vu dins totes le bonnes maisons ??? Je m’in resovindrai, je vos ou promette… su la parola de Gottabidaud… Me que disiens toujors à nontra Tiennette : ma chère amie, vétia lo frore Damase, o faut donno quoque chouse ou frore Damase… Donna y ina petita gotta de vin de Planchi-Bille, metta y in morciau de sicre dedins, o y fara de bien à l’estomac ; donna y ina mesura de blo, donna y dueux, donna y trais, quatre, donna y ina demie dozaina, suivant la saison… Et nontra Tiennette y donnove ina mesura de gaude, in peu de brasa, de blo, tot ce qu’é bien bon dins in ménageo.
Mais je te revarrai, je te revarrai… Ah je t’in donnerai va .. su le rein, l’an que vint, avoué ma granda triqua… maux né que t’es… T’amusi ainsi ou dépens dou poure Gottabidaud…
Mais n’ouvrirais-tu po ta porta, chambra d’hypocrite, chin de renégat, bouffre d’escogriffo ?...
Oh me poures bonnes gins, me que sué si sinsible à zinjures, j’in prenno in trimblemint dins tous le mimbres…
Ouais, tot icin me donne la coliqua jusqu’ou bot dou talons ; la fievra me galope dins lo corps, jusqu’ou cheveux… Ah.. je n’in poyo plus… Je sué tot ébloyi… oi, oi, oi…
Pore Sambé, à mon secours, je n’in poyo plus, veni vite….. ouf… (Il tombe)

Sambé

Oh… oh… Benoit, qu’ayiens vos donc ?...

Gouttebidaud, se relevant
Oh qué coup ou minton que je me sué donno. Je n’ayiens plus qu’ina bonna dint dins la bochie et la vétia casso…

Sambé

O faut allo vos chauffo ou coin dou feu et pindint ce timps jou m’in voué gardo lo Divin Efant…

Fin du deuxième acte

Troisième Acte

Scène I

Sambé, le Magnin

Sambé

Dou timps que le pore Gottabidaud se chauffe ou coin dou feu, me je voué gardo ce Divin Efant… Mais que donc qu’o yé ?...

Le Magnin

Refondr’les cuillers, rétamé les fourçettes, refilé les assiettes à l’anglaise, eufs… Moi pour la bienfacture de l’ouvraze, ze souis touzours bien vu, bien réclamé dans toutes les bonnes maisons où z’ai travaillé… Ze fais de l’étamaze imitant parfaitement le plaqué de Lyon, mi par bac, astrocatarle, da ka castapouf triboulac…..
(Se tournant vers Sambé) Serviteur, Mossiou.

Sambé

Eh bin que donc que te réclames te ?... Que donc que te demandes ?

Le Magnin

Vous me la fissez bonne, vous autres, ce que ze demande, ce n’est pas la santé, grace à Dieu ze l’ai… Ze demande de l’ouvraze…

Sambé

De l’ouvrage ?... Te ?... Par te ?... Téssa in magnin, hein ?...

Le Magnin

Pour cela ze m’en fais honneur…

Sambé

Te po bien te n’in faire honneur, lou magnin sont tous de voleurs ; y mettont toujors la picie à couto dou trou…

Le Magnin

Sarcomédis… Si vous n’étiez respectable par votre aze, ze vous passerais un saudiron sur votre gros nez de Gnafron…

Sambé

Oh… te me passerio in chaudron su le no… Eh bin possa te celequi su le tin… (Il lui donne un soufflet)

Le Magnin, se défendant
Pierre, frère Pierre, au secours (Il s’enfuit)

Sambé

Ce bougre de magnin, a m’a passo son chaudron su l’estomac…
Té vé core cherchi ton frore Pierre… A n’a qu’à vené, je l’arrangerai tot comma te… Sayi vos bin me bonnes gins parceque j’ai battu ce magnin ?... L’an passo a m’a demando nontra grossa icuella de maison ; je y ai donno ; le gaillord qu’a te fait ?... A l’a metto la picie à couto dou trou et nontra Benoite s’est tachia sa bavetta….. Revions, revins… te n’a qu’à revené…
Mais que donc que j’intindo per iqui ?

Scène II

Sambé, le blanchisseur

Le blanchisseur, chantant

Vive un blanchisseur habile
C’est un charmant ouvrier
Toujours gai, toujours docile
Demandant qu’à travailler
Et gnif et gnaf
Et pif et paf
Demandez à Colas
L’autre jour il me rencontra
Me dit comm’ci, me dit comm’ça
Blanchis par ci, blanchis par là
La chemise, la culotte et les bas
Je suis blanchisseur de Brindas

Sambé, lui tirant les oreilles

Tiens bavord que t’es, vétia pa tous tes tra-la-la… O te convint bin de vené insulto iqui pa de chansons mondaines nontron Diu Sauveur dins sa crèchie…

Le blanchisseur, pleurant

Mon Dieu… mon Dieu… Un pauvre blanchisseur qui fait sa tournée… Tomber ainsi sous la main de gens qui ne parlent qu’à coups de poing… Ah mon Dieu… mon Dieu…

Sambé

Si t’esses buandi, vins mon gors, vins prayi lo bon Diu, a prindra soin de te…

Le blanchisseur

Oh vieux fou… Que les cinq cents diables te crèvent la panse… ! Il lui donne un coup de tête dans l’estomac et lui jette son sac au visage.

Sambé

Attinds attinds… In pou de mé je le teniens. Je sué sur qu’a l’est d’in mauvais paye…. A m’a donno in grand coup de têta dins l’estomac et pu ce petit bougre que m’a foutu sou zaffaire dins le z’yux, que je n’y voye plus…

Scène III

Sambé, Milon

Sambé

Mais vole, que donc que je voyo vené ; yé lo pore Milon que vint de la Milonnierie, lu aitot det connaitre la granda novella…

Milon

Bonjor, pore Sambé…

Sambé

Bonjor, pore Milon… Vos aitot vos ayi du apprindre la granda novella que dépu cetta né mette in rumeurs nontron villageo de Vaugneray…

Milon

In effet je la connaisso, j’ai into revilli cetta né pa ina musiqua de le plus belle, je sué sortu dins nontron jardin et j’ai vu ina tropa de biaux efants blancs que m’ont det d’allo à Vaugneray, pa y adoro nontron Sauveur que venient de naitro… Ina etella det m’indiquo la placie… Je chercho ce l’indré, poyi vos me l’indiquo ?...

Sambé

Ce petit efant couchi dins celle étable est nontron Sauveur… Qu’ayi vos donc vué pa n’y po vère ciar, vas ayi cepindant ina excellente vue quand o s’agit de chassi la livra, lou lapin et le pédrés à la Maletta.

Milon

Grace à Diu, ma vuya est toujors bonna, mais je sué incore tot ému de ce que j’ai vu et intindu cetta né et o y a trais jors… Vué je rindo visite à n’in Roi et mardi passo, yé me qu’ai reçu in roi vé me

Sambé

Qué roi a bin pu allo jusqu’à la Milonirie, ou le chemins sont si mauvais( ?) et oncque le terres sont tellamint in pinta que le chures ne poyant po se tené su you quatre pattes…

Milon

Le roi que demuro à Paris…

Sambé

Oh… oh… vos ayi bien de la chancie que lo roi se derange pa vené vos vère… Raconto me donc cinqui, Gottabidaud et la Tiennette serant bien contints de ‘zeu savé

Milon

Vétia… J’étiens éto à la chassi dou couto dou pro fou – vos connassi bin lo pro fou, ce pro que le monde de Vaugneray appelant le pro que trimble… ?

Sambé

Je le connaisse assez… Même ina vai, je m’y sué infonço jusque so le bras et…. Si le pore Glaudius Soupat n’étiant po veni à mon secours, je crayo bien que j’ariens pardu lo got de la piquetta…

Milon

Eh bin j’étiens iqui depu in momint et étiens occupo à tindre mou filès pa prindre de ramiers

Sambé

Mais braconni que vos étes, vos n’ayi po peu que nontre seigneurs lou chanoines comtes de Lyon, ne vos fassent arreto et comparaître devint you officier de justicie de Grézie dans cella granda solla on qu’o ya ina si bella chemino, et pu ne vos fassent mettre in prison ?...

Milon

La justicie de nontre seigneurs n’est po sévéri mon poure Sambé et you officier de justicie dort su se dueux orilles… Je vos disiens que j’étiens éto tindre me filès lorsque j’ai vu sorti dou boué dou couto de la Vernaye de biaux seigneurs qu’étient à chiveaux. Tous ayant de chapiaux à plumes, de joyes bottes et de costumes de velou, suramint fabriquo pa nontre millou velouti de Messimy. Ou mitan de le, o yayé yien plus biau que tous le autres. O yien a yien que me fait signe de m’approchi et a me disait que lué et sou compagnons s’etient pardu dions la montagne ; y me preiront de you montro lo chemin po gagni Lyon avint la né. Mais a cella saison lou jors sont corts ; arrivo à la Milonnierie, comme la né étié venoie, je you proposais de resto dins nontra poura maison… Comme je n’ayiens po assez de yies pa couchi tot ce monde, je passiens la né à piailli ou coin dou feu…

Sambé

Et que donc que vos ayi raconto pindant to ce timps ?...

Milon

Après avé parlo de la plévie et dou biau timps et de saisons que ne se fant plus comme les autres vais, le biau seigneur, que n’ayé causé rin dit, jusqu’à ce momint, se mette à m’interrogi su ma famille et dessu mé. Pu a me remerciait pa l’hospitalito que je yeu ayiens donno et me disait de y demando ce que me farait plaisé, ajoutant que poyait tot m’accordo pusqu’a l’étié le roi… Lo tonnure dou bon Diu serait chu su la maison que…..

Sambé

Je vos compreno… Me aitot je n’ariens po su que dire…

Milon

Après ina minuta de reflexion, je y disais que ce que me farait le plus plaisé, o serait d’avère la permission de chassi su totes le terres de nontre seigneurs… A peina mon désir étié formulo, que l’un de sou compagnon sortait d’ina petita sacochie ina granda pluma d’oyie, d’incre et ina foye de parchemin ; a zou présentait au roi que se mettait à griffono… Quand a lué finé, a me disait : Té vétia ine autorisation pa chassi… Yé me qu’étient contint… Je voué dins n’in momint porto ce parchemin à Monsiu Duxio ( ?) de la Pruté que vé faire in no quand a varra la signature dou roi.

Sambé

Jou crayo bien… Vos pourriez aitot m’apporto de timps in timps ina livra ou in lapin que ne demindera rin à personna.

Milon

Et pu nontron roi m’a aitot confio, qu’a s’etiait arreto à Lyon plusieurs jors pa permettre à nontra reina de se reposo, qui veniant dou Puy on qui zétiant into in pelerinage pa imploro Nontre-Dama, afin que you donno ou plus tord l’efant tant desiro que det être plus tord roi…

Sambé

Oh… comme je le comprenne bien, et qué malheur pa ello de ne pas avé de zenfants

Milon

Vole que je vos ai raconto tota mon histoire, je voué présinto mou z’hommage ou divin Efant… (Il se met à genoux)
Petit Efant qu’êtes veni ou monde pa rachito lou z’homme dou péché originel, protegi ma famille, donno nos à tous joie, santo, prospérito…
Petit Efant que pa humilito êtes veni ou monde dins ina crépi, ou mitan de poures gins, donno à tous le travar ; benessi nontre ‘zefforts ; eloigni de no le zintemperies et le disettes…
Petit Efant qu’ayi toujors chéri nontra patrie, que ayi donno tant de saints et de saintes, protegi la, eloigni della le guerres intestines et etrangères, donno à tous la paix, exauci le prayières de nontron roi et de nontra reina et que d’abord l’efant tant attindu venne faire you bonheur et celé de you peuple… Ainsi soit-il !

Sambé

Mais vos parlo fort bien Milon… travar… famille… patrie, rin ne manquo… So vos itie into in peu plus sovin tà l’écola, vos arie fait in bon prédicateur…

Milon

Adiu Sambé, je no revarran yin de ceto modi, quand je viendrai vindre mon jubie ou marchi et je n’in profiterans pa bère in coup insimble…

Sambé

Adiu… adiu et surtout ne tardi po trop à vené ou marchi…

Scène IV

Sambé, le Bailli

Sambé

Mais que donc que je voyo vené, oh… o yé Monsiu le bailli… Bonjor Monsiu le bailli…

Le bailli

Bonjour Sambé… Il se passe quelquechose d’anormal, depuis cette nuit, dans notre paroisse de Vaugneray… Je ne vois que troupes joyeuses et endimanchées qui se dirigent du côté de la Déserte… Un grand événement vient certainement d’arriver…

Sambé

Mais comme donc, Monsiu le bailli, vos ne connaissi po la bonna novella… In petit Efant est né cetta né à Vaugneray, que vint no rachito du péché originel…

Le bailli

Je ne sais rien… Et pourtant j’aurais dû être le premier informé de cet événement… Ma police toujours en éveil aurait dû me prévenir… Mes hommes d’arme, pour une fois aurait dû me prévenir… Mais… tu vois Sambé, je n’aime pas toutes ces histoires… ces gens qui viennent la nuit troubler l’ordre public et la tranquillité de la paroisse… Je ne vois pas ça d’un bon œil…

Sambé

Mais que cragni vos donc Monsiu le bailli ? Comme donc que vos voli que de poures gins comme cele que sont itchi dans cela crépi, vos causent de zennuis ?...

Le bailli

Oh mon ami… On ne sait jamais… Si je ne préviens pas Monseigneur notre Gouverneur, je risque de tomber en disgrâce… et si je fais arrêter ces gens, je puis encourir un blâme, pour excès de zèle… Tu vois devant toi un homme bien embarrassé…

Sambé

Mais non… Mais non, Monsiu le bailli, o ne vos arrivera rin de desagrioble… Veni presento voutres zhommages bien simplament o ce petit Efant, lué qu’é tot puissant arrangera tot.

Le bailli

Ah… cela non Sambé… Me compromettre, compromettre ma situation… mon avenir… par un geste imprudent et inconsidéré… jamais ! Je préfère me retrancher dans une stricte neutralité, et aller réfléchir chez moi, pour savoir quel parti je dois prendre… (S’en allant) Oui, c’est cela, pas d’imprudence…

Sambé

Allo, allo… Monsiu le bailli et reveni bientôt, avoué vontron conseil, pe présento voutris zhommages à cé petit Efant… (A part) Je crayo bien que Ponce-Pilate est incore vivant…

Scène V

Sambé, la dame de Lyon

Sambé

Mais que donc que je voyo incore vené par iqui ?... Oh… oh… o yé ina fenna, pa ma fa trop bien misa et trop bien harnachia.
Lo solai s’oscurçait, on n’y vet plus ina gotta ; le zetelles brillant… Mon Diu… mon Diu… je crayo bien qu’o yé ina incrédula que vint per iqui…

Plusieurs voix

Place… place…

La dame

Fais place, et range toi manant…

Sambé

Qu’êtes vos pa parlo comme icin ?

La dame

Qui je suis ? Tu n’es qu’un insolent… un impertinent… tu vas voir qui je suis :
(Chanté)
Du plus haut étage
Je prends l’étalage
Pour qu’à mon passage
L’on dise en tremblant
C’est une dame
Une grande dame
Voyez vous la suite
Qui vient sur ses pas
Rangez vous bien vite
Ayez chapeau bas (ter)

Sambé

Mais bajafla que t’es, aré tu d’abord finé avoué te hâ… hâ… hâ ? Vins-tu iqui pa adoro lo divin Sauveur ou pa l’insulto ? Vé t’in d’iqui ou plus vite, car ta mina mondana ne feriait qu’irrito lo bon Jésus, dama Marie et sire José…

La dame

Que dis tu ? Vieux fou… Je ne te connais pas. Je veux chanter, danser, rire et m’muser à ma fantaisie… entends-tu ?

Sambé

Mais bajafla que t’es, rintra in te même… Prinds bien gorda que le bon Diu ne te fasse chère son tonnure su la têta… Vais-tu bien celou zéclairs comme de sarpints de feu, que sont prêts à te devoro ?

La dame

Je ne crains rien. Laisse moi passer ou j’appelle mes gens.

Sambé

Te ne passerais po… Acota le tonnure que redoble… Mon Diu, ayi pidia de la poura ( ?)

La dame

Laissez moi passer… Laquais à mon secours… (La foudre éclate, la dame pousse un cri, et tombe morte et… le diable l’emporte)

Sambé

Mon Diu, mon diu, me braves gins, que j’ai donc ayeus pou. Vetia in éclair que m’a ébloui lou zyux…. Mon Diu, o ya donc fallu que lo bon Diu la tuèze pa y apprindre à vivre… Te vétia bien avancia, poura drola… Playe à Diu que tous lo zorgueillux sayant accomodo de la sorta…

Scène VI

Sambé, Gouttebidaud, Tiennette

Gouttebidaud

Yétait vos pore Sambé ? Que donc que vos faites incore iqui ? Mais que donc que vos ayi ?

Sambé

Que donc qu’o ya ? O ya que je veno de vère lo diable.

Gouttebidaud

Lo diable, oh… oh… Par me je veno de me chauffo avoué la Tiennette…

Sambé

Oh… la Tiennette et lo diable, yé tojors à pou près la mêma chousa.

Gouttebidaud

 

- La fin du manuscrit est perdue -

 


Glossaire


Nous avons inscrit les mots particuliers au francoprovençal de Vaugneray, à l’exclusion des mots très proches du français, soit par emprunt probable, soit par identité d’origine et d’évolution.

Les verbes sont signalés par leur infinitif, ou à défaut par leur occurrence conjuguée.

C. L. février 2007
 

acoto   écouter
adiu   adieu
affaire N M au sens de vêtement
agrioble   agréable
aibobis   ébaubis
aidie   aider
aiga   eau
aimo   aimer
aitot   aussi
apprindre   apprendre
arrosou   arrosoir
attindre   attendre
autre   autre
autrevai   autrefois
avai   avoir
avint   avant
aviso   regarder
avoué   avec
bajafla   bavarde
barbelle   bavarde
barbotte   (il) bavarde
bargis   bergers
barille   tonneau
bavord   bavard
benessi   bénissez
bère   boire
bétes   bêtes
biau   beau
Biaujolais   beaujolais
bicherées mesure de surface bicherées
bichi   biche
bin   bien
blo   blé
bochie   bouche
bodin   boudin
bola   boule
bonjor   bonjour
borgs   bourgs
bot   bout
botilla,   bouteille
boton   bouton
boué   bois
bourgne   (juron)
brasa   mie ( ?)
bré   bruit
Brindos village Brindas
buandi   lavandier
buchie   bûche
burre   beurre
causé   quasiment
celo M Pl ces
cepindant   cependant
ceviri   civière
chamba   jambe
chambra   chambre
chapiaux   chapeaux
chapoto   frapper
charchi   chercher
chargi   charger
Chatanay lieu dit Chatanay
chin   chien
chiqua   chique
chiveaux   chevaux
chocun   chacun
chousa   chose
chura   chèvre
ciar   clair
ciergeons   enfants de chœur
ciochie   cloche
cisieaux   ciseaux
co   cas
coïvo   balai
commindo   commander
compos   compas
conduère   conduire
consequint   conséquent
contints   contents
contor   contour
copo   couper
cori   courez
corle   courge
corts   courts
couire   cuire
coussie   cuisse
couto   côté
Couvent-Vieux lieu dit Couvent-Vieux
cragni   craignez
crainti   crainte
crais   crois
Craponne village Craponne
crayi   croyez
crépi   crèche
creva-cueur…   crève-cœur
crinci   grincer
crosson   berceau
curiu   curieux
d’abord   pour commencer
dais 1e p présent indic syncopée dis
daits   doigts
darri   derrière
davant   devant
dedins   dedans
demindo   demander
deminge   démange
demuro   demeurer
dépu   depuis
dère   dire
desagrioble   désagéable
Deserte lieu dit (la) Déserte
det   dit
deussus-desso   dessus-dessous
devanti   tablier
devint   devant
diéti   diète
dihors   dehors
dija   déjà
dilai   de-là
din   dans
dint   dent
Diu   Dieu
dommageo   dommage
domo   dôme
dou   du
douqual   duquel
dous   doux
dozaina   douzaine
draiti   droite
drola   drôle
drolerées   drôleries
drolessi   drôlesse
dueu   deux
Duxio nom de personne Duxio
ébloyi   ébloui
écolies   écoliers
écort   écart
efant   enfant
épale   épaule
etella   étoile
etranllie   étrangle
faye   fallait
fenna   femme
fiégeoles   haricots
finé   finir
fôt   faut
foves   fèves
foye   feuille
frore   frère
fumi   fumier
gaillord   gaillard
gaude bouillie de maïs gaudes
gein adverbe de négation point
gins F Pl gens
Glaudius   Claudius
gogni   gagner
gorda   garde
gors   gars
gosi   gosier
got   gout
gotios   gâteaux
gotta   goutte
Grézie village Grézieu
grindes   grandes
gromin   chiendent
grous   gros
groussa   grosse
hommo   homme
hura   heure
icin   cela
icuella   écuelle
ignon   oignon
impogni   empoigner
in   un
ina   une
inavai   une fois
incore   encore
incre   encre
indré   endroit
intindre   entendre
pios   draps (d’enfant)
iqui   ici
isiau   oiseau
itchi  
jor   jour
jorno   journée
joya   jolie
jubie   gibier
jueux   jeux
Jumiaux lieu dit (le) Jumeau
lai   (de) là
lique   loquet
lisie pour elisie église
livra N F lièvre
magnin   rétameur
Maletirie lieu dit (la) Maletière
Maletta lieu dit (la) Malette
mein   mais
mélangie   mélangée
ménouési   menuisier
Messimy village Messimy
meti   métier
mètia   moitié
métio   mixture
mijor   midi
millou   meilleur
Milonirie lieu dit (la) Milonière
mingi   manger
minton   menton
mitan   milieu
mo   mal
modi   mardi
moilli   mouillé
mola   meule
molin   moulin
momint   moment
monsiu   monsieur
Montferra lieu dit Montferrat
morciau   morceau
na   une
nioles   nuages
nogie   neige
nontra F notre
nontron M notre
norrés   nourris
noviau   nouveau
Noyé   Noël
oi   oui
oncque  
onyes F ongles
orillie   oreille
oscurçait   obscurcit
oussitout   aussitôt
outor   autour
oyie   oie
pa   par, pour
par   par, pour
paradais   paradis
parchis   perchés
pardu   perdu
parmi   premier
parque   pour quoi
partia   partie
paye   pays
payi   payer
pe   par, pour
pédrés   perdrix
pendint   pendant
per   par, pour
piailli   bavarder
picie   pièce
pidia   pitié
pie   pied
Pinay lieu dit (le) Pinay
pindint   pendant
piota   patte, cuisse
pioye 3 p présent indicatif bavarde
Pira-Ronde lieu dit Pierre-Ronde
plaisé   plaisir
plan   doucement
Planchi-Bille, lieu dit Planche-Billet
playi   plier
plévi   pluie
po   par, pour
polaille   poule
por   par, pour
pore   père
porto   porter
pou   peur
pouro   pauvre
prayi   prier
prayières   prières
prindre   prendre
pro   pré
Pruté lieu dit (la) Prouty
pu, pus   puis
quaisons   taisons
qué   quel
quin   quand
quoque   quelque
quoquevai   quelquefois
rachito   racheter
rapatafiole   mette en pièces
redoble   redouble
rére   rire
resto   rester
révilli   réveillé
rin   rien
rindo   (je) rends
Roche-loui lieu dit Roche-Louis
rochi   rocher
rogeo   rouge
roua   rue
ruter   rôtir
sai   soir
sainti   sainte
santo   santé
sarpints   serpents
sarro   fermer
serres   scies
sicre   sucre
sille   seau
sillota   petit seau
sins   sans
socis   soucis
sofflont   soufflent
soffré   souffrir
solai   soleil
solla   salle
sopa   soupe
sorta   sorte
Soupat lieu dit (le) Soupat
sovint   souvent
su   sur
suageo   transpiration
suétie   suite
suramint   surement
tarri   terrier
tchi  
tia   (la) tienne
to   tout
tobla   table
tochon   tâchons
tonnure   tonnerre
tor   tour
tota   toute
toujor   toujours
trais   trois
traisieme   troisième
travar   travail
troblo   troubler
truffes   pommes de terre
vai   fois
  chez
vère   voir
Vernaye lieu dit (la) Vernay
vesina   voisine
vétia   voici
via   vie
vigni   vigne
villie   vieille
viri   tourner
viu   vieux
vo, vos   vous
volai   vouloir
volets   valets
vore   maintenant
voutron M votre
vué   aujourd’hui
vuya   vue
yacie   glace
yaçons   glaçon
yards   liards
yena pronom une
yin pronom un
you   leur
yux   yeux
Yzeron village Yzeron